1426 - Exemptions gabéricoises à la Réformation des fouages

De GrandTerrier

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Il s'agit des registres de la Chambre des Comptes de Bretagne, constitués par copies intégrales aux 16e et 17e siècles des documents originaux disparus de la Réformation des fouages [1] de 1426.

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Les transcriptions modernes ont été effectuées par le chevalier de Boisgelin (« Anciennes réformations de la noblesse de Bretagne (1427-1429) ») et par Hervé Torchet (« Réformation des fouages de 1426. Diocèse ou évêché de Cornouaille », 2001).

Autres lectures : « 1395 - Levée de fouage de Cornouaille en Bretaigne Bretonnante par le duc Jean IV » ¤ « TORCHET Hervé - Réformation des fouages de 1426 en Cornouaille » ¤ « 1536 - Réformation des personnes et des terres en Ergué-Gabéric » ¤ « 1481 - Monstre générale des gens d'armes de l'Evesché de Cornouaille » ¤ « 1562 - Monstre de l'arrière-ban de l'Evesché de Cornouaille à Quimpercorentin » ¤ « Familles nobles gabéricoises » ¤ 

Présentation

Description de la réformation générale des feux en 1426 par Norbert Bernard sur le site Tudchentil.org :

« Raisons de la réformation et raisons de sa conservation.

En 1426, la Bretagne est un État souverain. Pour faire face aux dépense de l’État, le duc ne peut plus se contenter des revenus de ses propres domaines, depuis plusieurs années, comme ses voisins, il lève des impôts qualifiés d’« extraordinaires », qualifié de fouage [1], car il est établi par feu, c’est-à-dire par foyer fiscal.

Pour dénombrer le nombre de sujets soumis au fouage on fait des enquêtes appelées « réformation des fouages » [1]. Et la façon, la plus simple de compter les imposables est de compter la population totale des paroisses et de soustraire les non-imposable. Sont non imposables les pauvres et les nobles, ainsi que les métayers des nobles, à raison d’un métayer exempté par paroisse pour les nobles y ayant plusieurs manoirs.

Certaines réformations sont locales (celles de 1444 ou 1448), celle de 1426 couvrit tout le duché.

En 1668, le pouvoir royal exige des nobles de prouver leur noblesse. Il y est alors dit que « [les réformations] qui se sont faites dans le siècle de 1400 ont été estimées très sûres et très véritables ». La chambre des Comptes de Bretagne ouvre ses dossiers et ce texte de 1426 devient une aubaine car la qualité de noble est mentionnée. C’est de cette époque que datent un grand nombre de copie de cette réformation. »

Jean Kerhervé, dans son introduction de l"ouvrage d'Hervé Torchet, présente la logique des demandes d'exemption à l'impôt des fouages :

« Toute une frange de la population rurale évoluait dans le sillage de cette aristocratie et profitait de ses relations particulières avec les nobles pour échapper à l'impôt. Les enquêtes dévoilent les procédures d'intimidation orchestrées par les Grands, qui, jouant de leur puissance sociale et de la crainte qu'ils inspiraient aux communautés, parvenaient à leur imposer la franchise de leurs hommes. En bénéficiaient d'abord les officiers privés de la noblesse, ses receveurs, ses sergents et agents divers. »

« Surtout, puisque le pouvoir admettait que " chascun noble homme " pût exempter " en son manoir, un mestaïer, là où le seigneur du lieu face sa résidence " [2], la tentation était grande d'étendre la franchise à tous les exploitants des terres nobles. La réformation permit de rappeler qu'il fallait que le manoir fût reconnu comme "manoir ancien", c'est-à-dire comme terre noble, jouissant d'un statut privilégié de mémoire d'homme, ce qui montre toute la complexité du fouage breton, impôt personnel certes mais impôt réel aussi, d'une certaine manière, puisque le lieu de résidence pouvait être invoqué par le candidat à l'exemption. »

Dans l'extrait ci-dessous, on notera que sur les 15 lieux d'enquêtes, neuf d'entre eux sont exempts (qu'ils soient nobles ou dépendants d'un noble attesté), alors que 6 roturiers doivent payer l'impôt des fouages [1].

a. Les exemptés :

  • Quélennec : famille noble Crozval ou Calvez.
  • Mezanlez : propriété d'Alain Kersulgar, lequel atteste l'acte.
  • Kenec'hcongar : propriété de La Lande.
  • Griffonez : détenue par Alix du lieu.
  • Kerjestin, aujourd'hui Keristin : propriété du Faou.
  • Kermelin : propriété Kervininen.
  • Penn- (ou guern) an Run : détenu par Hernault Prévost, 2e signataire de l'acte.
  • Kerfors : famille du Guern.
  • Kerfrez : proriété du Quenquis.
  • Etrangement le manoir de Lezergué n'est pas cité : peut-être n'était-il pas habité par une famille roturière susceptible d'être imposable ?

Les non exemptés :

  • Kergonan : l'ancienneté du lieu noble de Raoul de Liziard n'est pas reconnue.
  • Quénécrazec : détenu par les Kervastard.
  • Killiguezec (?) : propriété Ansquer.
  • Kerhezrou, ou Kerellou ? : familles Coetanazre et Riou.
  • Quenec'h Ergué.
  • Quilli- ou Kerle-houarn.

Transcriptions

Extrait gabéricois  :

Ergué-Gabéric.

Manoir du Quelennec : Guillaume le Mellec le jeune, métayer à Jehanne Crozval alias Guillaume Calvez, noble, demeurant en son manoir audit lieu, exempt.

Kerconnan [3]. Hervé Barz, demeurant audit lieu sous Raoul de Liziard, noble, auquel lieu est ledit Liziard demeurant et y fait sa maison, et le veut exempter de contribuer es fouages, combien que depuis la demeure dudit Liziard il accoutumait lui et le demeurant au lieu contribuer es fouages, et les paroissiens le contrarient, et sont sur procès pendant, et recordent lesdits témoins le lieu n'être mie manoir et ledit Liziard avoir ailleurs manoir, auquel sauve métayer, et le commissaire qui a été sur le lieu dit n'est pas manoir bien que ledit Liziard y a commencé un grand édifice. Il payera car ce n'est pas ancien. Jehan Barz, demeurant audit village sous autre seigneur.

Kernechcrasec. Yvon Gal, demeurant audit lieu sous Jehan Kervastar, noble, qui le veut sauver de contribuer es fouages, et lesdits paroissiens le contrarient, néanmoins ont été exemptés longtemps a, et semble ledit lieu n'être pas manoir ancien. Il payera.

Manoir de Maesanles. Alain Kersulgar demeurant audit lieu, noble.

Manoir Kernechcongar. Jehan Jourdain, métayer à Jehanne de la Lande, noble, exempt.

Manoir de Griffonez. Hervé Le Livec, métayer à Alix de Griffonez, noble, exempt.

Killiguezec. Daniel an Loyonec, homme à Jehan Ansquer, noble, exempt, demeurant en un estage audit lieu, lequel estage esr principal lieu dudit Ansquer et y fit son père sa mansion, et a estage en celui village et homme hébergé autre que celui et le parsus dudit village auquel y a 3 estages hébergés qu'ils contribuent, et sont à autre noble, et n'est pas le lieu manoir ni applacement de manoir, et ne sauve autre métayer, et a plusieurs hommes qui contribuent.

Manoir de Kerjestin. Yvon le Crom, métayer à Yvon du Faou, exempt.

Suite :

Manoir de Kermelin. Guillaume Nicol, métayer audit lieu à Geffroy Kernivinen, noble, exempt.

Manoir Guern an Run [4]. Jehan Amaesec, métayer à Hernault Prévost, noble, et demeure de sa personne au lieu.

Manoir de Kerfors. Thibaut du Guern et sa femme demeurant audit lieu et est ledit lieu à ladite femme, nobles.

Fief de Guergorlay

Kerhezrou. Gueguen le Guen, demeurant audit lieu, métayer à maître Jehan de Coetanezre, noble, lequel lieu sa mère eut en partage de Riou de la Rueneuve, son aîné, et sont nobles gens, et par avant la baillée, ils contribuaient es fouages et le veut ledit maître Jehan, principal hoir de sadite mère, sauver comme son principal lieu, et a ladite paroisse le nombre de 7 estagers qui contribuent es fouages, et lesdits paroissiens contrarient l'exemption dudit Gueguen, et ne sauve autre de contribution en celle paroisse.

Manoir de Kerfres. Guillaume an Naesset, métayer à maître Pierre du Quenquis, exempt.

Fief de l'évêque

Kernech Ergué. Guillaume Maczon, il se dit noble, et recordent les témoins qu'il est partable, et néanmoins ne contribue point. Il payera.

Kerlehoarn. Jehan Penanrun, il se dit noble, et les témoins recordent qu'il est partable, néanmoins a toujours été exempt. Il payera.

Hernault Prévost et Alain kersulgar témoins nobles.

Sommaire : 96 contribuants compté 7 femmes veuves pour 3 estagers. Il y souloit avoir 45 feux ramenés à 32 feux compté 5 feux de Guergorlé, 2 feux 2/3 d'évêque. Par Jehan de Bennerven et Olivier de Kaer. Arrêté le 15 février 1426.


Annotations

  1. 1,0 1,1 1,2 et 1,3 Fouages, s.m.pl. : impôt direct perçu sur les roturiers possesseurs de biens roturiers. Parfois appelé « tailles et fouages ». À cet impôt, perçu par une administration royale, les États ont ajouté au 17e siècle des fouages extraordinaires qui servent à financer leur fonctionnement et que le Tiers État considère comme une avance faite par lui seul (« Glossaire des cahiers de doléances », AD29). L'imposition se base sur le feu, c'est-à-dire l'âtre autour duquel sont rassemblés le chef de famille et ses enfants. Seul le nom du chef de famille est indiqué dans les registres. En Bretagne sous l'Ancien Régime, le fouage est un impôt provincial, une taille réelle levée sur les feux roturiers par le duc à partir de l'an 1365. (Wikipedia). En Bretagne en 1426 une enquête, appelée Réformation des fouages, est diligentée par les autorités pour déterminer le nombre des imposables dans chaque paroisse et la liste des exempts pour raison de rattachement à un domaine noble. [Terme] [Lexique]
  2. Blanchard, Lettres et mandements de Jean V, duc de Bretagne, n° 1661, 9 janvier 1420.
  3. Manoir de Kergonan, propriété de Raoul de Liziart qui y fait construire un nouveau château. Son petit-fils François de Liziart détiendra des prérogatives paroissiales (vitrail, pierre à enfeux).
  4. Manoir de Penarun. Propriété de plusieurs générations de Provost, dont Hernault signataire du relevé gabéricois pour la Reformation des fouages de 1426, et Jehan archer en brigandine en 1481.



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Thème de l'article : Un document ancien mentionnant des lieux ou des personnes d'Ergué-Gabéric Création : Août 2011    Màj : 13.07.2023