1668 - Reconnaissance de l'antienne extraction noble de François de Quersulgar

De GrandTerrier

LiasseSmall.jpg

Un arrêt de la Chambre de Réformation [1] de Rennes qui liste et valide les preuves de noblesse d'un gentilhomme d'Ergué-Gabéric, seigneur de Mezanlez.

ActeSource2.png

Le bénéficiaire est François de Kersulgar, marié à Marie Billoart, le dernier de 7 générations de Kersulgar, nobles résidant au manoir de Mezanlez.

Autres lectures : « ROSMORDUC Le Gentil Georges (comte de) - Arrêts de maintenue de noblesse » ¤ « 1426 - Exemptions gabéricoises à la Réformation des fouages » ¤ « 1481 - Monstre de l’Evesché de Cornouailles » ¤ « 1536 - Réformation des personnes et des terres en Ergué-Gabéric » ¤ « 1636,1638 - Cession du village de Bohars d'Alain Kersulgar de Mezanlez à Guy Autret » ¤ « Guy Autret et l'église d'Ergué-Gabéric, défense de ses prééminences » ¤ « 1454-1646 - Tous les adveus d'Ergue-Caberyc dans l'inventaire ADF-A85 de Kempercorantin » ¤ « 1736-1740 - Défense des droits de fief, de justices et de prééminences pour Lezergué » ¤ « Le tombeau enfeu noble des Kerfors à l'église St-Guinal » ¤ « Familles nobles gabéricoises » ¤ 

Présentation

Le comte de Rosmorduc a effectué un énorme travail de transcription des arrêts de la Chambre de réformation [1] du Parlement de Rennes, et il introduit ainsi le contexte historique de production de ces arrêts :

« C’est pour refouler dans les rangs de la bourgeoisie les nombreux intrigants, qui voulaient se faufiler dans le corps de la Noblesse, que Louis XIV ordonna, en 1668, une recherche générale pour toute la France. En Bretagne, une commission, qui reçut le nom de Chambre de la Réformation, fut désignée pour procéder à la vérification de la noblesse ; elle se composait des personnages suivants, qui appartenaient tous au Parlement de Rennes.  »

Pour Ergué-Gabéric une famille noble résidente pendant 7 générations, les Kersulgar ou Quersulgar, bénéficient d'un arrêt de maintenue ; l'origine de leur patronyme est mystérieuse, mais leur domaine bien réel, centré sur le manoir aujourd'hui disparu de Mezanlez en Ergué-Gabéric.

Entre 1634 et 1640, Alain de Kersulgar, sieur de Mezanlez, avait voulu se mettre en travers de son voisin Guy Autret de Lezergué, dans le projet de ce dernier d'élever son domaine en marquisat et à défendre toutes ses prééminences locales. Guy Autret l'emporta sur la plupart de ses prétentions (patibulaires, enfeu, armoiries), et Alain de Kersulgar fut débouté.

En 1668, le fils aîné François de Kersulgar fournit un nombre important de papiers familiaux pour prouver sa noblesse et les membres de la Chambre le confortent dans son titre d'écuyer, premier niveau de l'ordre : « Pour establir la justice desquelles conclusions, il articulle à faicts de genealogie que il est fils et unique heritier de deffunctz ... , lesquels se sont tousjours maintenus dans le gouvernement noble et advantageux, sans avoir degeneré ny faict aucunne action de rotture, et ont aussu tousjours pris les quallites de nobles et escuyers ».

Sept générations de Kersulgar, aînés ou puînés, et leurs alliances :


Alain I de Kersulgar (réform. 1426)
 x Jeanne de Mezanlez
 ├- Jan de Kersulgar
 ├- Yvon de Kersulgar, seigneur de Mez-en-Lez (montre 1481)
 ├x 1448 Beatrix de Kervezaout
 ├├- Jean de Kersulgar, sr de Mesanlez
 ├├x Jeanne de Kergoff
 ├├├- Alain II de Kersulgar, sr de Mesanles (reform. 1536)
 ├├├x Marie Botigneau
 ├├├├- Jan de Kersulgar, sr de Mezanlez
 ├├├├x 1616 Marye de Kerourfil
 ├├├├├- Alain III de Kersulgar, sr de Mezanlez (1636)
 ├├├├├x Claude de Moellien
 ├├├├├├- François de Kersulgar, sr de Mezanlez (1638, 1668)
 ├├├├├x Marie Billoart, dame de Mezanlez
 ├├├├└> Marguerite et Françoise de Kersulgar
 ├├├├- Claude de Kersulgar x Guillaume Le Guerriou
 ├├├└> Françoise de Kersulgar x Tanguy de Finamour
 ├├└> Marye, Françoise et Izabeau de Kersulgar
 ├└> Marye de Kersulgar x Louis Lesmais
 └> Henri de Kersulgar (1475 pour Kernaou)

Les documents d'archives fournis et apportant des preuves de noblesse sont les suivants :

  • les réformation des nobles de 1426 (Allain de Quersulgar), la montre [2] militaire de 1480-81 (Yvon), et la réformation de 1536 (Allain II).
BlogKersulgar.jpg
  • les actes de mariages avec enrichissements par alliance : le premier mentionné d'Yvon et Beatrix de Kervezaout en 1448, celui de Jan et Marye de Kerourfil en 1616
  • les actes de partages entre héritiers, frères et soeurs, à chaque génération : entre « Yvon et Henri Quersulgar, freres germains » en 1479, entre Jan Quersulgar « quallyfié fils aisné » et « sadite soeur, femme dudict Lesmais, laquelle l'accepta, recongnoissant qu'il estoit de gouvernement noble », avec Allain de Quersulgar, fils ainé et héritier principal, qui « baille une provision à Marye, Françoise et Izabeau, ses soeurs juveignerres [3], aussy fondees en droict » en 1525, entre damoiselle Françoise de Quersulgar et Allain de Quersulgar qui donne partage à sa sœur « à charge de ne vendre ny transporter à aulqu'unnes personnes les heritages mentionnez » en 1539, entre Jan et ses 3 sœurs juveigneures « à charge de tenir les heritages mentionnes audict partage et assiette à ramage dudidt de Quersulgar » en 1611 ...

Ce qui est récurrent, c'est la protection des puîné(e)s en cas de succession par le système spécifiquement breton de la « juveignerie » [3]. La règle appliquée en cas de partage est rappelée : « sçavoir les deux parts à l’aisné et le tiers aux juveigneurs  ». Mais les biens du domaine noble de Mezanlez ne seront pas éclatés pour autant car « la marque et juveigneurye [3] de ramage » ont été maintenues à chaque succession et partage, le mot « ramage » rappelant que les différents biens sont gérés comme faisant partie d'un tout familial.

Transcriptions

Avant-propos du comte de Rosmorduc

Les faux nobles, aujourd’hui innombrables, se montraient déjà avec audace au XVIIe siècle, toutefois, à cette époque, ils étaient impitoyablement poursuivis, tandis que de nos jours on voit des gens de la plus modeste extraction faire grand étalage de leur soi-disant vieille noblesse et traiter d’élucubrations grotesques les documents officiels qui rappellent la roture de leurs pères et réduisent à néant leurs chimériques prétentions nobiliaires.

Page 509

KERSULGAR (DE) Seigneurs de Mesanlez, etc ... (blason) D'azur à trois fleurs de lys d'argeant, surmontees de deux quintes feilles de mesme.

Extraict des registres de la Chambre establye par le Roy pour la refformation [1] de la Noblese de la province de Bretaigne, par lettres patentes de Sa Majesté du mois de Janvier dernier, veriffiees en Parlement :

Entre le Procureur General du Roy, demandeur, d'une part.

Et François de Quersulgar, escuyer, sieur de Mesanles, deffendeur, d'autre [4].

Veu par ladite Chambre :

L'acte de comparution faicte au Greffe d'icelle par ledict deffendeur, le 28e jour de Novembre dernier : le Clavier, greffier, contenant sa declaration de soustenir la qualité de noble escuyer, d'extraction et porter pour armes D'azur à trois fleurs de lys d'argeant [5], surmontees de deux quintes feilles de mesme..

Induction sur le seign de maistre François Legarec, son procureur, fournye et signiffyee au Procureur General du Roy par Testart, huissier, le 18e jour

Page 510

dudict mois de Novembre, par laquelle il soustient estre noble, issu d'ancienne extraction noble, et comme tel debvoir estre , luy et sa posteritté nee et à naistre en loyal et legitime mariage, [maintenu] dans la qualité d'escuyer et dans tous les dricts, privileges, preminances et exemptions attibues aux antiens et veritables nobles de cette province et qu'à cet effect il sera employé et inscrit au rolle et catalogue d'iceux du ressort de la senechaussee [6] et siege presidial [7] de Quimpercorentin.

Page 511

Un acte et transaction passé entre Yvon et Henri Quersulgar, freres germains, le 27e Febvrier 1479, par lequel il se voit que du mariage desdicts Allain et Janne Mesanlez seroit Jan, Yvon et Henry Quersulgar, que ledict Jan estant mort sans hoirs de corps, ledict Yvon, son frere, luy succeda noblement, et que ladite Mezanlez, sa mere, luy ayant donné par advancement de droict successiff quelques herittages, du consentement dudit Jan, son herittier principal et noble, il en referra la marque et juveigneurye [3] de ramage. Ledict acte signé et scellé.

Page 512

transporter à aulqu'unnes personnes les heritages mentionnez. Ledict acte signé : Tanguy et du Brieuc, passes.

La troisiesme, du 19e Novembre 1557, est un acte par lequel ledict Allain, pour suplemant de la somme de neuff livres de rente promises à Françoise de Quersulgar, soeur dudit Allain, par nobles gens Yvon Sallou, seigneur de Toulgouet, et Jan le Core, sieur de Querdaniel, curateur d'Allain, pour les successions desdicts Jan de Quersulgar et Janne Querdoff, fact assiette de la somme de quarante souls monnoye [8] de rente, pour suplemant de la somme de neuff livres, pour tout drict, avecq les recongnoissances d'heritier principal et noble audict Allain, son frere, dans lequel est resseré une autre transaction de l'annee 1535, icelluy troisiesme acte signé : Rolland et le Roy, passes.

Dans lesquels trois actes la qualité de noble et escuyer a esté employee ausdicts de Quersulgar.

Page 513

et dame de Querudalen, esdicts noms, auroient baillé et faict assiette à ladicte Claude de Quersulgar, acceptante, pour tout son droict naturel en ladite succession, la somme de vingt livres de rente en fonds d'heritages, pour en jouir ladite Claude à perpetuitté elle et les siens, à charge de les tenir en ramage, comme juveigneur [3] d'aisné. Ledict acte en datte du 14e Octobre 1585, signé : G. Lozec, nottaire royal.

Un contract de mariage passe entre nobles Jan Quersulgar, seigneur de Mesanlez, et damoiselle Marye Querouffil, fille de feu noble Tanguy Querouffil et de damoiselle Janne le Glas, sa femme, sieur et dame de Penenquer, le 7e Juillet 1575, signé : Queratri et le Meur.

Page 514

devant un conseiller dudict siege, dans lesdictes qualites d'escuyer leur sont aussy employees, le 23e mois de Decembre 1638, signé dudict de Lagarde, et icellé.

Et tout ce que par ledict deffendeur a esté mis et produit, conclusions du Procureur General du Roy, consideré.

La Chambre, faisant droict sur l'instance, a déclaré et declare ledict François de Quersulgar noble et d'antienne extraction noble, et comme tel luy a permis et à ses dessendants en mariage legitime de prendre la qualité d'escuyer et l'a maintenu au droict d'avoir armes et escussons timbres appartenants à sa qualité et à jouir de tous droicts, franchises, preminances et privilleges attibues aux nobles de cette province et ordonné que son nom sera employé au rolle et catalogue d'iceux du ressort de la senechaussee [6] et siege presidial [7] de Quimpercorentin.

Faict en ladicte Chambre, à Rennes, le 10e jour de Decembre 1668. Signé : Malescot.

(Grosse originale. - Archives du château de Kerminaouet, en Trégunc.)

Originaux

Annotations

  1. 1,0 1,1 1,2 et 1,3 Réformation, s.f. - A. du domaine royal : opérations de réformation lancées en Bretagne en 1537 par François Ier et en 1660 par Colbert. Il s'agit de vérifier l'ensemble des déclarations de propriété (les aveux) des sujets du roi, depuis le paysan ou roturier relevant directement du domaine royal jusqu'au puissant seigneur. Les commissaires de la Cour des Comptes de Bretagne siégeant à Nantes, chargés de défendre les intérêts du Domaine Royal, vont vérifier le contenu des aveux fournis pour l'occasion, en le rapprochant des actes similaires produits antérieurement : validité du titre de propriété, montant de la chefrente en nature et/ou argent versée annuellement au roi, droits attachés à la propriété (justice, ...). Source : histoiresdeserieb.free.fr.
    B. des fouages : contrôle permettant de vérifier qui est bien "Noble". Par exemple la Réformation des fouages en Bretagne en 1426 où les nobles doivent prouver leur noblesse, titre leur permettant d'échapper à l'impôt des fouages. Source : Wikipedia. [Terme] [Lexique]
  2. Montre, s.f. : revue militaire de la noblesse. Tous les nobles doivent y participer, munis de l’équipement en rapport avec leur fortune. Les ordonnances du duché de Bretagne spécifient minutieusement l’armement de chaque noble en fonction du revenu déclaré. Organisation maintenue après le rattachement du duché de Bretagne au royaume de France. [Terme] [Lexique]
  3. 3,0 3,1 3,2 3,3 3,4 3,5 3,6 et 3,7 Juveignerie, s.f. : avantage accordé en droit féodal à un puîné par rapport à l'aîné, en Bretagne et en Poitou ; source : Alain de Carné. Forme de tenue d'une terre noble, due, au départ, a un partage noble entre un aîné et son (ou ses) cadet(s) ; un juveigneur est un cadet qui a reçu une terre noble lors de ce partage. Source : Bertrand Yeurc'h. Partage noble qui donnait à l'aîné les deux tiers et l'autre tiers aux puînés, tant fils que filles ; mais cet autre tiers, les puînés devaient le tenir, chacun, comme « juveigneur d'aîné, en parage et ramage de l'aîné ». En parage : à égalité avec l'aîné vis-à-vis d'un seigneur supérieur ; en ramage : comme faisant partie de la même famille. Source : dict. de l'Ancien Régime de Lucien Bély. [Terme] [Lexique]
  4. Note Rosmoduc : M. Denyau, rapporteur.
  5. Note Romsmorduc : dans tous les nobiliaires de Bretagne ces trois fleurs de lys sont dites rangées en fasce.
  6. 6,0 et 6,1 Sénéchaussée, s.f. : juridiction d'un sénéchal ; étendue de sa juridiction. Sénéchal, s.m. : officier royal qui, dans certaines provinces, exerce des fonctions analogues à celles d'un bailli pour la justice, les finances, etc. Source : Dict. DMF. [Terme] [Lexique]
  7. 7,0 et 7,1 Présidial, s.m. : tribunal de justice de l'Ancien Régime créé au XVIe siècle ; c'est en 1552 que le roi Henri II de France, désireux de renforcer son système judiciaire et de vendre de nouveaux offices, institue les présidiaux ; le présidial de Quimper-Corentin a été créé à cette date dans le ressort du parlement de Bretagne (Wikipedia). [Terme] [Lexique]
  8. Monoie, Monnoye, adj : un sol monoie désigne une petite pièce de monnaie faite de billons, c'est-à-dire de cuivre, tenant un peu d'argent, mais plus ou moins, suivant les lieux (Encyclopédie Diderot). Existence de « livres monnoie » et de « deniers monnoye » à signaler également, en complément des livres tournois qui deviendront l'unique monnaie de compte en 1667. [Terme] [Lexique]



Tamponsmall2.jpg
Thème de l'article : Document d'archives sur le passé d'Ergué-Gabéric. Création : Juin 2016    Màj : 11.08.2023