1697 - Observation d'une éclipse de lune par le recteur Jean Baudour

De GrandTerrier

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Un acte de baptême dans lequel le recteur délivre son observation de l'éclipse de lune du 29 octobre 1697 et le trouble qu'elle ne manque pas de provoquer.

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Autres lectures : « PEYRON et ABGRALL - Notices sur les paroisses de l'évêché de Quimper et de Léon » ¤ « Carte de Cassini ou de l'Académie au 1:86400 de 1750-1790 » ¤ 


Présentation

Une éclipse lunaire est une occultation de la lune se produisant à chaque fois qu'elle se trouve dans l'ombre de la planète Terre. Ceci se passe uniquement à la pleine-lune, et lorsque la lune, la terre et le soleil sont alignés ou proches de l’être.

Chaque année en moyenne deux éclipses lunaires sont observables de notre planète. En octobre 1697 le recteur d'Ergué-Gabéric en fit une description alors qu'il rédigeait un acte de baptême.

Les termes qu'il utilisa en cette fin du 17e siècle n'étaient pas très scientifiques, et relevaient d'une prédication plutôt moraliste :

  • « une eclypse sur la lune qui nous pronostique et faict esperer un plein repos dans les troubles mesme les plus grands et les affaires les plus obscures ».
  • « cet astre ne se cachera à nos yeux que par la jalousye du Soleil qui ne pouvant esclairer que peu de gens dans le trouble et dans le désordre s'en prendrera à son opposé »,
  • « mais elle en reviendra toute victorieuse, et pour marque de sa victoire , après avoir paru autant obscure qu'on le puisse estre, elle reviendra tout à coup, si brillante, que l'éclat de sa lueur surprendra autant et plus ».
  • « Dieu veille par sa Sainte-Miséricorde que je ne me trompe pas dans l'explication de ce que j'ay apperçu ».
Christophe Colomb montrant une éclipse

Relevé du recteur

Dans le registre des baptêmes de l'année 1697, le recteur Jean Baudour [1] relève l'éclipse de Lune qu'il a observé comme suit :

Le 29 Octobre 1697 a esté baptisée en l'eglise paroissiale d'Ergué-Gabéric par Mr Jan Baudour pretre recteur de la dite ergué-gabéric adelice fille legitime de guillaume nicot et d'adelice le calvez, sa compagne, et a esté nommée par claude lazennec et janne. Signé Baudour.


A mesme jour et heure que sus dit il se vit une eclypse sur la lune entre six et sept heurs du soir qui nous pronostique et faict esperer un plein repos dans les troubles mesme les plus grands et les affaires les plus obscures, cet astre ne se cachera à nos yeux que par la jalousye du Soleil qui ne pouvant esclairer que peu de gens dans le trouble et dans le désordre s'en prendrera à son opposé luy fera la guerre, mais elle en reviendra toute victorieuse, et pour marque de sa victoire , après avoir paru autant obscure qu'on le puisse estre, elle reviendra tout à coup, si brillante, que l'éclat de sa lueur surprendra autant et plus que son obscurité n'aura faict, Dieu veille par sa Sainte-Miséricorde que je ne me trompe pas dans l'explication de ce que j'ay apperçu. J. Baudour, Prestre Recteur d'Ergué-Gabéric, Claude Lazennec.

Le relevé sera signalé par le chanoine Peyron dans sa notice paroissiale :

Le 29 octobre 1697, à la suite de baptême, le recteur note en ces termes une eclipse de lune : « À mesme jour et heure que sus dit, il vist une eclipse sur la lune, entre six et sept heures du soir ...  ».

Et dans Les Cahiers de l'Iroise on trouvera également cet encart :

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Observations scientifiques

L'éclipse lunaire du 29 octobre 1697 a fait l'objet d'observations par un grand nombre de scientifiques européens : l'anglais Edmond Halley (ayant par ailleurs étudié la comète dite de Halley), les français Jacques Cassini [2] (astronome et géographe), Jean Bonfa (père Jésuite), Jean-Mathieu Chazelles (astronome et hydrographe), Louis Feuillée (Père, astronome et botaniste du roi), l'italien Francesco Bianchini (abbé philosophe et astronome) et l'espagnol Jakub Kresa (père Jésuite, mathématicien astronome).

Dans le tome 7 (seconde partie) des Mémoires de l'Académie Royale des Sciences, page 70 et suivantes, Jacques Cassini [2], dit Cassini II, père et grand-père des créateurs des cartes dites Cassini, explique sa démarche :

A Rotterdam.

Le 29 octobre.

Pour me préparer à l'observation de l’éclipse de Lune, je dressai au Pole la grande lunette de mon Octans, & après l'avoir arrêté dans cette situation, je plaçai dedans le tuyau, un Cilindre mobile autour de son Axe, à l'extrémité duquel, il y avoit un genou qui portoit une lunette de 4 pieds, de sorte que lorsque cette lunette étoit dressée à un astre, en la laissant tourner autour de son Axe, elle le suivoit & décrivoit un parallele à l'Equinoxial.

...

Et il poursuit ses mesures, dont le but est de calculer les positions géographiques respectives de quelques villes françaises comme Paris, Avignon et Marseille :

A 6h 38' 58". La Lune au sortir des nuages, paroissoit éclipsée à la vûë simple. Je plaçai le fil parallele le bord septentrional de la Lune, et je fis ces observations.

...

La Lune étant entièrement sortie des nuages, je marquai la sortie de l'ombre de quelques taches.

A 9h 9' 4" Langrenus sort de l'ombre.
A 9h 9' 20" Fin de la mer de tranquillité.
A 9h 13' 40"' Aristote sort de l'ombre.
A 9h 14' 40" Fin de la Mer Caspienne
A 9h 15' 40" Cleomodes sort de l'ombre.
A 9h 21' 34" Fin de l'Eclipse.

Par la comparaison des observations faites à Avignon et à Marseille, avec celle de Rotterdam, l'on voit que Rotterdam & Avignon sont sur le même Méridien (6 secondes n'étant pas considérables dans une observation d'éclipse de lune) et que Marseille est plus oriental que Rotterdam de 2 minutes 32 secondes d'heure. La différence des Méridiens entre Paris et Marseille ayant donc été trouvées par les dernières observations des satellites de Jupiter de 12' 30" d'heure, celle de Paris à Rotterdam sera de 10' 0", moindre de 36 secondes que celle que l'on a tirée de la fin de l'éclipse, observée de part d'autre en ces deux villes.

Annotations

  1. Jean Baudour fut recteur de la paroisse d'Ergué-Gabéric de 1678 à 1716.
  2. 2,0 et 2,1 Jacques Cassini, dit Cassini II, né à Paris le 18 février 1677 et mort à Thury le 16 avril 1756, est un astronome français. Il est le fils de Giovanni Domenico Cassini et de Genevève de Laistre. Élevé par son père, il étudie à l'Observatoire de Paris (où, dit-on, il serait né) avant même d'entrer au collège Mazarin. Il devient élève astronome à l'Académie des sciences en 1694, puis il succède à son père en tant que pensionnaire de l'Académie en 1712. L'astéroïde (24102) Jacquescassini a été nommé en son honneur. Son fils (Cassini III) et petit fils (Cassini IV) s’appuieront sur ses expériences géodésiques pour élaborer leurs cartes.



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Thème de l'article : Etude et transcriptions d'actes anciens Création : mars 2006    Màj : 13.08.2023