Jean-Marie Le Bras (1894-1915), soldat du 64e RI

De GrandTerrier

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Un jeune soldat de 20 ans mort à Tahure dans la Marne le 25 septembre 1915, le jour même de la toute première offensive lors de la seconde bataille de Champagne [1].

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On trouvera ci-dessous la relation de cette journée dans le Journal des Marches et Opérations du 64e Régiment d'Infanterie, ainsi que les infos généalogiques et biographiques du soldat, et une photographie familiale inédite où on le voit quelques mois avant son incorporation militaire.

Autres lectures : « Portail des Poilus de 1914-18 » ¤ « René-Marie Le Bihan (1888-1915), soldat du 2e RIC » ¤ « Corentin Le Gall (1893-1915), soldat du 116e RI » ¤ « Jean-Louis Bihannic (1890-1915), soldat du 116e RI » ¤ « 1919 - Les deux mariages des soeurs Le Bras » ¤ « 1915-1919 - Les combats de Pierre Tanguy en Marne, Somme, Aisne, Meuse et Allemagne » ¤ « DOUGUET Jean-François - Etienne Le Grand, un regard breton dans la Grande Guerre » ¤ « DOUGUET Jean-François - Ergué-Gabéric dans la Grande Guerre T1 » ¤ « DOUGUET Jean-François - Cornouaillais dans la Grande Guerre T2 » ¤ 

Résumé biographique

Fiche de poilu mort en 1915 [2] :

  • Naissance le 21 mai 1894 à Kernescop en Briec.
  • Fils de Jean Le Bras et de Anna Poupon.
  • Soldat dans le 64e Régiment d'infanterie.
  • Matricule 5770 au Corps.
  • Matricule 4099 au recrutement de Quimper.
  • Tué à l'ennemi le 25 septembre 1915 à Tahure (51).
  • Jugement du tribunal de Quimper du 2 juillet 1921.
  • Registre de décès d'Ergué-Gabéric n° 28 du 2 juillet 1921.
  • Inscrit sur le portail Mémoires des Hommes.
  • Mention « LE BRAS J. Quélennec » sur le Monument aux Morts d'Ergué-Gabéric.
  • Photo sur la plaque commémorative des 32 morts au champ d'honneur.

Compléments généalogiques :

Les parents de Jean-Marie étaient domiciliés à Quélennec en 1914-15, puis à Stang-Venn. Son père était agriculteur, puis ouvrier papetier. Sa mère était également ouvrière à la papeterie en 1927 [3] (« son mari était porteur de pate »).

Jean-Marie était domestique chez Sébastien Coic à la ferme de Pennarun au recensement de 1911.

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Tué à l'ennemi

Le généralissime Joffre, chef de l'armée française, en lançant les grandes batailles de Champagne de 1915 [1], se justifiait par une formule : « Je les grignote ». Cette stratégie eut comme conséquence un bilan humain terrifiant : plus de 320.000 morts du côté français.


En relatant le déclenchement de six vagues d'assaut, le Journal du 64e décrit l'enfer de l'offense du 25 septembre :

  • « Tous les hommes qui reviennent témoignent que les allemands ont criblé de grenades ceux de nos blessés qui donnaient le moindre signe de vie »,
  • « Le Lieutenant colonel rend compte que le régiment est parti à l'attaque d'une manière enragée, que les efforts faits par les 3 premières vagues et des éléments de la 4e pour franchir le rideau de fils de fer ont été poussés jusqu'à l'extrême limite du sacrifice.  ».

Mais au final, malgré les pertes humaines énormes, on se satisfait de l’héroïsme des soldats : « Tout le régiment a fait superbement son devoir et n'a été arrêté que par l'obstacle infranchissable des fils de fer dont la valeur est démontrée par les pertes sévères que nous avons subies : 34 officiers et plus de mille hommes ».

On peut voir sur la carte ci-dessous (source chtimiste.com) que, le 25.09.1915, le front français le plus avancé et le plus exposé aux tirs ennemis est bien sur la commune de Tahure.

Les trois autres gabéricois décédés ce même 25 septembre 1915 dans le même secteur de la Marne :

Et quelques jours plus tard : François Cloarec (29.09.1915, Perthes), Yves Riou (04.10.1915, Tahure), Pierre Marie Poriel (06.10.1915, Mesnil-Lès-Hurlus)

Journée du 25 septembre 1915 dans le Journal des Marches et Opérations du 64e Régiment d'Infanterie (transcription GrandTerrier) :

« Vendredi 24. Même situation, le régiment part à 23 heures pour prendre ses positions.

Samedi 25. L'attaque de la côte 196 se fait conformément à l'ordre n°1 (voir dossier). "Le 25 septembre au matin le régiment est disposé dans l'ordre suivant :

  • 1e vague. 6e Cie à gauche, 5e Cie à droite sous le commandement du Capitaine Dupré.
  • 2e vague. 8e Cie à gauche, 7e Cie à droite sous les ordres du Capitaine Mondon Commt le 2e Bataillon.
  • 3e vague. 1e Cie à gauche, 2e Cie à droite sous les ordres du Capitaine Chénard.
  • 4e vague. 3e Cie à gauche, 4e Cie à droite sous les ordres du Chef de Bataillon Morin Ct le 1er Bataillon.
  • 5e vague. 11e Cie à gauche, 12e Cie à droite sous les ordres du Capitaine Tessier.
  • 6e vague. 9e Ce à gauche, 10e Cie à droite sous les ordres du Chef Bataillon Baligne Ct le 3e Bataillon.

Avec la 1e vague marchait une section du génie de la 11/1. Avec la 2e vague marchait une section de pionniers du régiment. Avec la 3e vague marchaient deux sections de Mitrailleuses du Régilement. Avec la 4e vague marchait une section du génie 11/5, avec explosifs pour le nettoyage des tranchées.

Deux autres sections de Mitrailleuses suivaient cette vague qu'elles devaient dépasser après les tranchées allemandes pour rejoindre les 2 sections précédentes. Elles emportaient un canon de 37, un groupe de bombardiers du régiment emportaient 2 mortiers Cellerier et marchait avec ces 2 sections.

La 6e Compagnie est représentée par un adjudant et une vingtaine d'hommes. La 7e Cie par un sous-lieutenant et 70 hommes. La 8e Cie par quelques hommes. Dans la nuit 2 sous-lieutenants de cette Cie serrés dans un trou de marmite [4] contre les fils de fer boches parviendront à rejoindre ramenant quelques hommes isolés.

Tous les hommes qui reviennent témoignent que les allemands ont criblé de grenades ceux de nos blessés qui donnaient le moindre signe de vie, le lieutenant Lhermite blessé d'une balle a reçu aussi de nombreux éclats de grenades qui ont aggravé beaucoup sa blessure. Un allemand parlant français parcourait le bord de la tranchée en appelant les hommes leur criant : "Par ici, par ici ...", sans doute dans l'espoir de faire des prisonniers, espoir qui ne paraît pas s'être réalisé.

Le Lieutenant colonel rend compte que le régiment est parti à l'attaque d'une manière enragée, que les efforts faits par les 3 premières vagues et des éléments de la 4e pour franchir le rideau de fils de fer ont été poussés jusqu'à l'extrême limite du sacrifice.

La compagnie de Mitrailleuses du 64e est parvenue à ramener tout son matériel grâce au dévouement de ses cadres et de ses hommes.

Tout le régiment a fait superbement son devoir et n'a été arrêté que par l'obstacle infranchissable des fils de fer dont la valeur est démontrée par les pertes sévères que nous avons subies : 34 officiers et plus de mille hommes ».

Photographie de 1914

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Sur la photo: Les parents Jean et Anna née Poupon. Et de gauche à droite : Jean, Marie-Anne, Anna-Marie, Jean-Marie, Marie-Catherine, Marie-Jeanne et Marie. Les deux sœurs Marie-Anne et Marie se marieront le même jour en 1919.

Annotations

  1. 1,0 et 1,1 La première bataille de Champagne est une offensive des armées françaises contre les armées allemandes en région Champagne lors de la Première Guerre mondiale qui commence le 14 décembre 1914 et se poursuit jusqu'au 17 mars 1915. La seconde bataille de Champagne est une bataille qui oppose du 25 septembre 1915 au 9 octobre 1915, les troupes françaises et les troupes allemandes dans la mêle région de Champagne.
  2. Cahier n° 1 d'Arkae « LEMOINE Marie-Annick & LE GRAND Nicole - Souvenons-nous de nos poilus » ¤ .
  3. Anna Poupon est également mentionnée comme entrée à l'usine Bolloré en 1908. En 1922 il y a aussi une veuve Anne Le Bras qui a 20 ans de services, donc entrée en 1902.
  4. Dans l'argot des poilus, une marmite est un obus ou un trou d'obus ; un marmitage est un bombardement dense et continu.



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Thème de l'article : Histoire d'une personnalité gabéricoise Création : Février 2014    Màj : 25.02.2024