La nativité du retable de Kerdévot

De GrandTerrier

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Une évocation de la scène de la Nativité du retable flamand de Kerdévot du XVe siècle, photographiée avant le vol de statuettes le 6 novembre 1973.

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Autres lectures : « Plaques de verre et photos anciennes du musée départemental breton » ¤ « Retable flamand de Kerdévot » ¤ « FATY Bruno - Le retable de Notre-Dame de Kerdévot » ¤ « ABGRALL Jean-Marie - Le Retable de Kerdévot » ¤ « DURAND Gildas - La statuaire à Kerdévot » ¤ « ROSSO Daniel - Retable et relations Bretagne-Flandres aux XIV-XVIe siècles » ¤ « Espace Chapelle de Kerdévot » ¤ « Les marques de fabrique des ateliers flamands du 15e siècle sur le retable de Kerdévot » ¤ « Un concours de peinture pour le retable de Kerdévot » ¤ « Les deux retables de la Vierge d'origine flamande et du 15e siècle à Ternant et Kerdévot » ¤ 


Description


Avant le cambriolage et le vol des statues en 1973, le premier tableau du retable de Kerdévot, réalisation des ateliers d'Anvers et de Malines au 15e-16e siècle, avait vraiment fière allure. Consacré à la nativité du Christ, ce tableau présentait une crèche avec une iconographie originale, et il s'en dégageait une joie et allégresse inspirée.

Aujourd'hui, la plupart des personnages sont manquants. Il reste les trois bergers de gauche, le bœuf et un ange, mais sont absents l'âne, la servante à la lanterne, la Vierge Marie, le christ dans son berceau, saint Joseph, le musicien sonneur de cornemuse, le quatrième berger à droite. Avec la perspective peu probable de retrouver ces statues, ne serait-il pas opportun aujourd'hui de reconstituer les pièces disparues en se basant sur les descriptions et photos d'archives ci-dessous ?

Dans le bulletin de 1894 de la Société Archéologique du Finistère, Jean-Marie Abgrall décrit ainsi la scène de la Nativité du retable de Kerdévot :

« Près de l'Enfant-Jésus est agenouillé un petit ange vêtu d'une robe longe et d'une dalmatique ... Dans l'arrière-plan, séparés des personnages principaux par une petite clôture en osier, sont trois bergers, dont l'un joue de la musette, le second porte une houlette [1], le troisième a une main élevée et l'autre posée sur la claie en osier. Les deux premiers sont coiffés de chapeaux, le dernier d'un capuchon pointu. Ces personnages, par leurs gestes et leur expression, semblent s'entretenir du mystère dont ils sont témoins.... Sur le premier plan, à droite un berger jouant de la cornemuse, instrument semblable à nos binious bretons. ».

Voir le texte complet de JM Abgrall ci-après.

L'Enfant-Jésus est étendu à terre sur un pan du manteau de la Sainte-Vierge. Celle-ci est à genoux, les mains jointes et la tête penchée, en adoration et en contemplation devant son Fils divin qui vient de naître. Ses cheveux divisés en tresses nombreuses descendent sur ses épaules et jusqu'à ses reins ; elle est couverte d'un manteau très ample dont les bords s'étalent sur le sol. La bordure de ce manteau est composée d'une inscription gothique en lettres d'or sur fond vermillon et donnant tout le texte de la Salutation angélique : AVE. MARIA. GRATIA. DOMINUS. TECUM. BENEDICTA. TV. IN. MILIERIBVS ...

De l'autre côté de l'Enfant Jésus, saint Joseph, appuyé sur un bâton, enlève son chapeau de la main droite et se dispose à s'agenouiller devant l'Enfant dont il sera le père, le nourricier et le gardien. Il est vêtu d'une robe longue et d'un manteau, et porte une besace ou une sorte d'aumônière [2].

Près de l'Enfant-Jésus est agenouillé un petit ange vêtu d'une robe longe et d'une dalmatique [3]. Sur le premier plan, à droite un berge jouant de la cornemuse [4], instrument semblable à nos binious bretons. Sur le col de son capuchon, on lit aussi les paroles de l'Ave Maria. Son expression de ferveur et d'entrain est admirable, et il faut remarquer encore le style de sa chaussure et surtout ses jambières ou molletières qu'on retrouve dans les statues de saint Yves à Plonéis, à Gouézec et aux chapelles de Quilinen, en Landrévarzeec, et de Saint-Vennec, en Briec.

En face de ce berger musicien, de l'autre côté, derrière la Sainte-Vierge, est une femme portant une lanterne. Son costume est riche ; les manches très courtes de son corsage, terminées par des franges, laissent échapper des manches longues aux plis très amples, sous lesquelles on en remarque d'autres très étroites qui serrent les poignets. Sa tête est couverte d'une coiffure semblable à un turban, retenue par un ruban formant mentonnière, noué sur le sommet du chef et retombant sur le dos. Cette femme rappelle un personnage à peu près identique, dans une mise au tombeau sculptée dans l'autel du bas-côté nord de l'église de Rosporden, et sa coiffure se trouve reproduite dans une statue de sainte Barbe à Guengat et dans une des Saintes-Femmes de la descente de croix de Quilinen.

Dans l'arrière-plan, séparés des personnages principaux par une petite clôture en osier, sont trois bergers, dont l'un joue de la musette, le second porte une houlette [1], le troisième a une main élevée et l'autre posée sur la claie en osier. Les deux premiers sont coiffés de chapeaux, le dernier d'un capuchon pointu. Ces personnages, par leurs gestes et leur expression, semblent s'entretenir du mystère dont ils sont témoins. Un quatrième berger, encapuchonné aussi, débouche par une petite arcade, derrière saint Joseph.

Le bœuf est tout près de l'Enfant-Jésus, à côté de saint Joseph ; l'âne est plus loin, derrière la femme à la lanterne. La moitié de cette scène est abritée par une toiture délabrée portée sur quelques frêles piliers, et dont on voit la charpente à nu.

Galeries de photos

Photos anciennes

Abel Soreau, 1890-1900

Inventaire général, Spadem, 1956

Photo de V.H. Debidour in « Kerdévot, Ergué-Gabéric », édition Kerdévot 89.

Les trois musiciens

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Reproduction

Dessin à l'encre de Chine d'après photos d'archives ; réalisation A.C. 2010.

Annotations

  1. 1,0 et 1,1 Houlette = Bâton utilisé par le berger, pourvu à l'une de ses extrémités d'une plaque métallique, creusée en forme de gouttière, destinée à arracher des mottes de terre ou à ramasser des pierres qu'il jette de manière à faire revenir dans le troupeau les moutons qui s'en écartent. Source = Trésors de la Langue française.
  2. Aumônière : Bourse que les hommes et les femmes du Moyen Âge portaient à la ceinture, pour y contenir, à l'origine, l'argent destiné aux pauvres. Dans un sens plus large et plus moderne, petit sac porté ou non à la ceinture, surtout par les femmes, contenant des objets d'utilité courante, ou destiné à recueillir de l'argent. Source : Trésors de la Langue française.
  3. Dalmatique : Tunique blanche à manches longues, puis courtes, brodée de pourpre, empruntée aux Dalmates, en usage chez les Romains, puis au moyen-âge. Source : Trésors de la Langue française.
  4. Jean-Luc Matte décrit ainsi l'instrument de musique dans son iconographie de la cornemuse : « Un bourdon d'épaule à plusieurs raccords, hautbois dont le pavillon est bizarrement coudé à 90° (forme de "bouche d'aération de paquebot" à l'envers) ».



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Thème de l'article : Patrimoine de la commune d'Ergué-Gabéric Création : décembre 2009    Màj : 5.02.2024