Modèle:BA-Tinténiac-90

De GrandTerrier

Jean lui fit bon accueil et l'observa. C'était un bel homme, jeune, de petite taille, aux manières exquises et aux mains blanches et fines. Il était habillé avec une certaine recherche. Il boitait très légèrement. Il montrait l'esprit le plus fin et raconta avec verve quelques-unes de ses aventures. Il avait servi d'aide de camp et d'agent de liaison au marquis de La Rouërie et couru toute la Bretagne ainsi que le Maine pour transmettre des informations aux conjurés. La traversée à la nage d'une rivière ne lui faisait pas peur lorsque le pont était tenu par les républicains. On n'eût jamais deviné, à le voir faire le galant cavalier devant les dames, qu'il eût connu déjà auparavant une vie aussi aventureuse. Jean examina attentivement son visage carré, aux traits énergiques, entouré d'une brune et raide chevelure. Il avait un nez crochu qui l'apparentait à un oiseau de proie. Son regard sombre restait vigilant même lorsqu'il plaisantait et semblait se laisser aller. L'oncle Joseph glissa à Jean en aparté que le gouvernement anglais avait choisi M. de Tintinéac comme agent de liaison avec l'armée vendéenne. Jean se fit la réflexion qu'il aurait été souhaitable de ne pas divulguer une telle information - si tant était qu'elle fût vraie. Il osa dire à mi-voix : « Il vaudrait sans doute mieux que cela ne soit pas su ; on prétend que les républicains ont des espions même ici en ville. » Le chevalier hocha la tête, l'air un peu gêné.