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De GrandTerrier

Un soir, j'étais allé voir cette comédie. Lorsque les confessions et les cantiques furent terminés, un de « ces pères » nous fit un sermon sur les guerriers chrétiens. Cependant il devait être embarrassé là, puisque nous allions faire la guerre aux chrétiens, et mieux encore au chef de la chrétienté, au grand vicaire de Jésus-Christ, le confrère en carbonari, et le compère de notre « Magnanime Empereur », qui devait y perdre toute sa puissance temporelle. Cependant, le malin jésuite connaissait les choses mieux que nous, car il annonça à la fin que nous ne tarderions pas à partir. Et voila que le soir même, à l'appel, on nous prévient que le quartier serait consigné le lendemain matin, et qu'il nous fallait préparer nos effets de parade, tuniques, shakos et autres effets inutiles en campagne, pour être versés au magasin.

Ah ! quels cris de joie et d'allégresse accueillent cette annonce, des cris de : « Vive l'Italie ! », « Vive la France ! ». Et les discussions et les commentaires tout en emballant les effets inutiles ou jetant les bibelots encombrants, il fallait entendre cela ! Si Jules Radu [1] eût été là encore, à écouter ces discussions sur l'Italie, son histoire et sa position géographique, il se serait dit : je leur ai vendu un livre sur lequel il n'y a rien, mais réellement ils en auraient d'un qui leur apprendrait au moins que l'Italie n'est pas en Afrique, et que Waterloo, quoique rimant avec Marengo, n'est pas en Lombardie, et que le général Kléber ne fut pas vainqueur des Autrichiens à Alexandrie, et de centaines d'autres sottises qui se disaient là au sujet de l'Italie. Cependant, on ne nous avait pas dit quel jour, ni à quelle heure nous partions, ce ne fut que le lendemain à onze heures, qu'on nous avertit de nous tenir prêts à partir à trois heures du soir. Encore, on ne nous dit pas où nous allions : faire une étape, ou prendre le train ? Nous n'avions pas l'habitude de prendre le train en ce temps-là.

N'importe, à trois heures nous étions sac au dos, et un quart d'heure après, nous marchions vers Paris, au milieu d'une foule de gens qui bordaient les deux côtés de la route, criant : « Vive l'Italie ! », « Vive la France ! », « Vive le 26e de ligne ! », agitant leur mouchoir, leurs chapeaux, des branches d'arbfres, des fleurs ; ...

[...]

  1. Jules Radu, né en 1810 et mort après 1883, est un écrivain et pédagogue français. Il fonde en février 1848 une Société de bienfaisance, dite Société de bibliothèques communales et propagation des bons livres, dont l'objet est de doter d'une bibliothèque toutes les communes de France, d'Algérie et des colonies.