Rêveries d'un potier solitaire par Loïc Pichon

De GrandTerrier

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|Spectacle de et avec le comédien Loîc Pichon [1] qui, seul en scène dans atelier de poterie, interprète Jean-Marie Déguignet de retour de ses voyages et campagnes militaires, et qui délivre ses observations à la fin de sa vie bien remplie.

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Texte non publié à ce jour, mais spectacle vivant toujours joué en 2018-2019 par la Compagnie des Deux Albatros.

Autres lectures : « CORRIOL Benoit - François Marie » ¤ « DÉGUIGNET Jean-Marie - Histoire de ma vie, l'Intégrale » ¤ 

Présentation

Un spectacle conçu en 2008 s'inspirant directement des « Mémoires d'un paysan bas-breton » de Jean-Marie Déguignet (1834-1905) : fils de mendiant, il s’engage dans l’armée de Napoléon III et s’intéresse aux religions qui n’ont jamais cessé de s’affronter ; revenu au pays, il se marie et exerce le métier potier et essaie de trouver le sens du monde et de sa vie.

Quant au titre, on ne peut pas s'empêcher de penser aux « Rêveries du promeneur solitaire, ouvrage inachevé de Jean-Jacques Rousseau rédigé entre 1776 et 1778, où l'auteur délivre des réflexions autobiographiques et philosophiques.

Le potier parle, de ses voyages et des religions, tout en activant son tour de potier et montrant ses poteries d'argile :

  • « Quel Jésus ? Il a vécu là autrefois à Jérusalem. Il parait qu'autrefois cet homme-là il disait qu'il était le Fils de Dieu ... »
  • « À peu près dans la même région, quelques siècles plus tard, voilà qu'un arabe, un certain Mohammed, se met à faire à peu près les mêmes discours à propos de Dieu ... »
  • « Alors c'est la guerre, tout simplement la guerre. Les religions pour qu'elle se fassent reconnaître et se faire respecter, ça a toujours été par la violence ... »
  • « Heureusement il n'y a pas que de la colère, il y a aussi de la beauté. C'est vrai, la religion catholique, elle est ce qu'elle est, mais quelle beauté artistique elle a engendrée ... »
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Quelques extraits

Transcriptions

Mais la lune qui passe la nuit dans le ciel, plus vite que les autres, le soleil qui passe sous la terre, ah ! c'est peut-être aussi de la technique, mais comme on sait pas qui l'a fait, on pourra jamais l'expliquer. Et ça la nuit autrefois quand je dormais près de mes bêtes, et que je regardais le ciel, ça m'empêchait de dormir.


De marseille on était parti en bateau, en passant par Constantinople, sur deux navires anglais, un à voile, l'autre à moteur. Mais ils allaient à peu près à la même vitesse, technique ou pas, c'était pareil.


J'ai connu ça, condamné à finir là dans une maison au bout du monde, plus rien, plus personne pour vous parler, pour vous donner à manger, pour vous faire vivre comme un homme, plus rien, plus de force, plus de vie, on attend.


Jérusalem c'est pas rien, je vois pas Jérusalem comme on arrive à Lorient, Marseille, ou même à Constantinople, même si on croit pas en Dieu. Tout le monde en a entendu parler de Jérusalem, et tout le monde connait à peu près l'histoire du Christ ...


Quel Jésus ? Il a vécu là autrefois à Jérusalem. Il parait qu'autrefois cet homme-là disait qu'il était le Fils de Dieu. Franchement si on se promène, tranquille, au bord d'un lac par exemple, et qu'on voit quelqu'un paisible, assis sur une pierre : "Je suis le Fils de Dieu". Même si n'a rien contre, on peut quand même se poser des questions, "Fils de Dieu" qu'est-ce que ça veut dire ?


Et là la barbarie peut commencer. Alors attendez, attendez, j'ai relu ça il n'y a pas longtemps. Pour crucifier un homme, il faut l'allonger sur le dos sur une croix en bois, et voilà pas que Jésus pacifiste, avec deux énormes pupitres traversant les poignets et s'enfonçant dans le bois de la croix. Et puis on relève la croix, et on l'enfonce dans le sol, de telle sorte que les pieds du condamné sont presque à toucher le sol. Presque, parce qu'en fait on fixe une sorte de butée sur laquelle le condamné pourra poser ses pieds. Et d'ailleurs pour qu'il les pose, on les fixe sur la butée avec encore un gros clou qui traverse les pieds et s'enfonce dans la butée. Un vrai spectacle !

Et ouais. À peu près dans la même région, quelques siècles plus tard, voilà qu'un arabe, un certain Mohammed, se met à faire à peu près les mêmes discours à propos de Dieu. Cette fois, lui il dit que c'est Allah, il l'appelle comme ça. Mais, ça se ressemble, ils s'appelaient tout autant. Dans le monde arable, il fait un malheur. Evidemment les chrétiens ne peuvent pas accepter un tel plagiat. Alors c'est la guerre, tout simplement la guerre. Les religions pour qu'elle se fassent reconnaître et se faire respecter, ça a toujours été par la violence.


Pour le tombeau du Christ, ils allaient faire la guerre aux infidèles. On ne sait pas combien il y a eu de morts, mais des milliers, des dizaines de milliers de morts, pour la défense d'un tombeau, construit et reconstruit par les Mahométans eux-mêmes. Et suffisamment pour plaire aux Chrétiens, puisqu'ils l'ont gardé en l'état. Ah c'est ce qu'on nous montre encore aujourd'hui quand on y va, moi c'est ce que j'ai vu quand je suis passé.


Je parle, je parle, je parle. Il faut dire qu'il est fou ce type à parler tout le temps. C'est parce que vous êtes là. Normalement il n'y a personne ici, je suis tout seul. C'est à côté de l'usine de la faïence ; vous me faites beaucoup d'honneur, surtout que mon travail n'a rien d'exceptionnel.


Avec la faïence, la céramique, la faïence, on peut faire du modelage aussi. Après, quand ça sèche, que ça durcit, c'est un peu comme le marbre, le marbre blanc, surtout si on le met à cuire. Comme de la sculpture. Des fois je m'amuse à faire ça aussi, la Joconde. Elle s'ennuie, elle est triste, parce qu'elle croit qu'on l'aime pas. Oh mais c'est pour moi, juste pour moi, je ne montre pas.


Ah les religions ! Heureusement il n'y a pas que de la colère, il y a aussi de la beauté. C'est vrai, la religion catholique, elle est ce qu'elle est, mais quelle beauté artistique elle a engendrée. Et dans tous les domaines : peinture, architecture, sculpture, musique. Quand même ça aussi ça l'a fait vivre. Oh c'est même surtout ça !

Annotations

  1. Comédien, Loïc Pichon s'est illustré en jouant La Peste, d'Albert Camus au théâtre et Frère Jean-Pierre dans « Des hommes et des dieux », le film de Xavier Beauvois qui a obtenu le Grand Prix du jury à Cannes en 2010. Il a conçu et joué un spectacle tiré de « La Peste » d'Albert Camus, ainsi qu'un one-man show inspiré par les « Mémoires d'un paysan bas-breton » de Jean-Marie Déguignet.



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Thème de l'article : Video sur la mémoire et l'histoire d'Ergué-Gabéric Création : janvier 2019    Màj : 8.09.2023
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