Lestonan

De GrandTerrier

Variantes bilingues : Lestonan (FR), Lestonan (BR)

Signification : "cour seigneuriale d'un dénommé Donan"

Décomposition : Les pour "cour seigneuriale, habitation enclose" (vieux-breton), et patronyme Donan. Diminutif formé du vieux breton Don ("don naturel, grâce"), ou dérivé de Dôn (reine-mère dans la mythologie galloise), ou de Don (héros de mythologie gaelique)

Relevés : 1539, 1540, 1678, 1790, 1834

Coordonnées géographiques : lat. 48.019898, long. -4.021597, cf. « Géo.Lestonan »

Présentation générale

Le village situé entre l'ancienne usine d'Odet et la départementale D15, dite route de Coray, est aujourd'hui une véritable agglomération englobant les lieux-dits Ker-Anna, Menez-Groaz, Kerhuel et Penn-Carn. Jusqu'aux années 1920 le hameau est décentré sur les quelques maisons de Petit Lestonan (Leston-vihan), tel que mentionné dans le cadastre Napoléonien de 1838 :

Cadastre1838Lestonan.jpg

Toponymiquement, le nom d'origine « Lez-Donan » peut se traduire par la cour seigneuriale (Lez) d'un dénommé Donan dont on a perdu la trace.

Dés la fin du XVe siècle la spécificité du lieu, les deux piliers de potence / fourches patibulaires [1] ou « patibulaires à deux pots », est mentionnée : « justice patibullaire en ung villaige de Lestonan en la parroesse d'Ergué Gabéric ». Les seigneurs du manoir voisin de Lézergué y possèdent une haute, moyenne et basse justice placée sur la « montagne de Lestonan » où les cadavres des criminels sont publiquement exposés.

En 1840 le déplacement et la reconstruction du bourg d'Ergué-Gabéric sur les terres de Lestonan, point plus central au niveau communal, font l'objet d'une décision et vote du conseil municipal. Mais suite à multiples contestations et pétitions, le projet sera abandonné.

Au début du XXe siècle Lestonan a connu un apport important de maisons et d'habitants du fait de l'activité industrielle croissante de la papeterie d'Odet. Entre 1928 et 1931, l'entrepreneur René Bolloré fait construire deux écoles libres : l'école des filles (Sainte-Marie) inaugurée le 28 septembre 1928 par Mgr Duparc, et celle des Garçons (Saint-Joseph) le 24 septembre 1929.

Les commerçants, dès cette époque, se multiplient : le boulanger Naour, puis Germain Guéguen ; le restaurant et salle de balle de Jean-Pierre Quéré ; le bistrot et bureau de tabac d'Alain Joncourt ; la forge de Yann ar Marichal, la boucherie de Pierre Rospape ; les bistrots Quéré, Joncourt, Donnard, Mollis, Kergourlay, Vonne ...

Les autres personnalités importantes du village sont les anciens instituteurs d'avant 1940, qu'ils soient de l'école publique ou des écoles privées : en 1910, Paul-Emile Godet, « il a l'étoffe d'un bon maître, mais c'est dommage qu'il ait des moments de faiblesse » ; de 1926 à 1939 Jean Lazou, militant communiste, colombophile et organisateur de belles kermesses ; en 1929-31 Grégoire Salaûn directeur de l'école catholique St-Joseph ...

Quelques éléments du patrimoine vernaculaire [2] du lieu-dit :

SacréCoeurLestonan.jpg
Et pour terminer nous vous proposons une énigme à résoudre : quelle est l'origine de ce motif visible sur une pierre en façade de l'une des petites maisons de la place de Lestonan ? Si vous savez où et comment cette pierre est arrivée là, on est friand de toutes explications.

Autres articles : « 1511 - Mandement de la Chancellerie pour relever les patibulaires de Lezergué-Lestonan » ¤ « 1736-1740 - Défense des droits de fief, de justices et de prééminences pour Lezergué » ¤ « L'essor de Lestonan (1900-1950) raconté par Jean Guéguen » ¤ « RANNOU Betty - Le Bourg, chef-lieu à Lestonan » ¤ « Balade à Lestonan du 10.08.2006 » ¤ « Balade à Lestonan du 20.07.2006 » ¤ « Cap sur l'an 2000 - 4 - Lestonan, OF-LQ 1987 » ¤ « AC'H François et RAULT Roger - Les écoles publiques de Lestonan, 1880-1930 » ¤ « Ecoles privées Saint-Joseph et Sainte-Marie de Lestonan » ¤ « 1927-1929 - Tentative de fermeture de l'école communale de Lestonan par René Bolloré » ¤ « Jean et Francine Lazou, instituteurs de 1926 à 1950 » ¤ « Pierre de parement en sacré-coeur sur un penn-ti de Lestonan » ¤ 

Explications toponymiques

Bernez Rous écrit dans la revue Keleier de l'association Arkae en février 2006 :

Les formes anciennes sont Lesdonan (1540), Lestonnan (1540), Lesthonan (1678), Lestonnant (1678), Lestonan (1685). L'étymologie du nom est donnée par la plus ancienne forme Lez-Donan, qui peut se traduire par la cour (Lez) d'un petit noble rural dénommé Donan. Mais la prononciation de Lez renforce le D en T, et l'accent tonique très fort sur l'avant-dernière syllabe sur le /To/ de Tonan renforce le Z en S. Celle-ci d'ailleurs accentue tellement l'avant dernière syllabe que la dernière ne s'entend plus. On dit /Leston'/, comme on dit chez nous /bar/ au lieu de bara. C'est la conséquence de notre accentuation. On peut donc garder la graphie actuelle Lestonan qui, sans dénaturer l'origine du mot, tient compte de la prononciation locale.

Dans le Cahier n° 9 d'Arkae publié en 2007, Bernez Rouz explique l'origine du lieu-dit comme suit :

Lestonan (Lestonan)
Lestonan Vihan(Lestonan Vihan)

Orthographe Année Source Référence, côte
Lestonan 1539 A.D.L-A. B 2012
Lesdonan 1540 A.D.L-A. B 2013
Lesthonan 1678 A.C.E-G. B.M.S.
Lestonnant 1678 A.D.F. A 89
Grand Lestonan
Petit Lestonan
1790 A.D.F. A 89
Lestonan 1834 A.C.E-G. Ancien cadastre
Lestonan Vihan 2002 I.G.N. Carte 0618 O

Ce nom est composé de Les + Donan. Donan est probablement un nom d'homme qui s'est renforcé en Tonan après Lez.

Bernez Rous écrit dans son étude en breton "Anviou-Lech an Erge-Vras" achevée en 1977 (et dans un résumé de bulletin an Erge-Vras en 1980) :

8 - LEC'HIOU ISTOREL

b) ANVIOU GANT LEZ

Lez : e kembraeg llys (court)

-- Lestonan Lestonan vian Lestonan-phonétique.jpg Lestonanvihan-phonétique.jpg (Lestonan) (Lestonan Vihan) 1678 : Lesthonan, 1680 : Lestonnan huela, 1685 : Lestonan

Anv un den eo TONAN sur a-walc'h. Bez 'z eus ur sant Tonan e Lestremel. Tud anavezet LE DON a zo ivez.


LESTONAN : Les ou Lez est un ancien mot désignant un manoir, une cour seigneuriale. Tonan est un nom de personne.

A propos de Les "cour seigneuriale", à ne pas confondre avec son homonyme Les ("lisière", "orée", comme dans Lescoat), Albert Deshayes précise dans son Dictionnaire des noms de lieux bretons (page 159) :

PARTIE "Les lieux de vie"
CHAPITRE "Les lieux habités"


Les "cour seigneuriale" est un terme d'emploi fréquent au Haut Moyen Age, que l'on rend dans les actes par le latin aula "habitation enclose ; palais, château, cour". Ce terme a pu s'appliquer aux premières constructions défensives des mac'htierns bretons qu'étaient les mottes élevées sur butte artificielle pour se défendre des envahisseurs ou des ennemis en général. Il procède du vieux breton lis "habitation enclose" et correspond au gallois llys et au cornique lys "manoir, cour".

Page 34 de son dictionnaire des noms de lieux bretons, Albert Deshayes explique le terme "Les" quand il ne désigne pas la cour seigneuriale :

PARTIE "Décrire la nature"
CHAPITRE "Des repères topographiques"


Les "lisière, orée" et "limite" en général se présente comme premier élément associé à 77 termes différents dont koad ou son équivalent vannetais koed à 35 reprises dans Lescoat, Lescoet ou Lescouet. Puis viennent loin derrière, gwern à 9 dans lesvern ou Leshuern, lec'h à 6 dans Leslec'h, dreseg, le, loc'h et menez à 5 respectivement dans Lestrézec, Leslé, Lesloc'h et Lesménez, krann, traoñ trev dans Lescran, Lestraon et dans Lestré- suivi d'un nom d'homme, etc.

Ce terme est toujours suivi d'un terme descriptif mais aussi d'un élément caractéristique du paysage comme un pont dans Lespont, un four dans Lesforn en Mellac (29), id. en 1540, ou Lesvorn en Ploudalmézeau (29), id. en 1656, une pierre levée dans Leslia en Quéménéven (29), id. en 1480, etc. Le second élément peut aussi être un nom de rivière comme l'Aulne dans Lezaon en Saint-Ségal (29), Lesaon vers 1600, le Dourdu dans Lestourduff en Lanmeur (29) et en Plouider (29), Lesdourdu en 1446, l'Ellé dans Leslé en Arzano (29), Lezele en 1621, le Goyen dans Lesvoyen en Meilars (29), Lesgoezian en 1446, le Steïr dans Lez-Steir en Quimper (29), Lesteyr en 1227.

[...]

Quant au patronyme Don, Albert Deshayes avance l'explication suivante page 286 :

Don est un hagionyme, éponyme de Saint-Don en Glénac (56) ; c'est également le nom d'un héros de la mythologie galloise : Don était le fils de Non ap Selyf. C'est l'équivalent du vieux breton et vieux gallois don "don naturel, grâce". Donan apparaît comme un diminutif du précédent. Il se montre peut-être employé seul dans Donan en Camlez (22). On le relève aussi dans Kerdonan en Plounérin (22), dans Kerdonen en Roudouallec (56), dans Moulin-Donan en Bégard (22), et, renforcé à l'initiale, dans Lestonan en Ergué-Gabéric (29), Lesdonan en 1540, et dans Saint-Onen en Plénée-Jugon (22), id. en 1423.

Il semble qu'il y ait eu une confusion entre les mythologies galloise et gaelique (irlandaise) qui présentent au moins deux personnages différents nommés Dôn :

Wikipedia/Ollamh : "Dôn est une déesse-mère de la mythologie celtique galloise. Ses enfants dieux sont les quatre frères Gwydyon, Hyveidd, Gofannon et Gilvaethwy et la déesse Arianrhod, la « roue d’argent ». Elle est la compagne de Beli Mawr (Beli le Grand), l’ancêtre mythique de certaines dynasties galloises.

Dans la littérature mythologique, elle apparaît notamment dans le conte Math fils de Mathonwy, qui est la quatrième branche du Mabinogi et dans Kulhwch et Olwen. Elle est l’équivalent de Dana, la grande déesse irlandaise des Tuatha Dé Danann"


Www.nordic-life.org/Mathfr : "Suivant les Iolo mss., il y a eu un Don roi de Llychlyn (Scandinavie) et de Dulyn (Dublin) qui, vers 267 après J.-C., amena les Gaëls en Gwynedd. Ils y restèrent pendant cent vingt-neuf ans, jusqu'à l'époque où ils furent chassés par les fils de Cunedda venant du nord de l'Angleterre (p. 81). Il y a eu encore ici probablement confusion entre le personnage mythologique de la reine-mère Dôn et un personnage réel. Chez les Irlandais, il y a aussi un Don, l'aîné des fils de Milet, personnage mythologique, et un Don Dess, roi de Leinster, dont les fils ravagèrent, avec un roi des Bretons, la plus grande partie des côtes de Bretagne"

Lestonan avant 1900

Les 17e et 18e siècles

Les patibulaires
Patibulaires.jpg

Avant la Révolution était attachée au manoir de Lézergué une justice haute, moyenne et basse qui utilisait des "patibulaires" situées sur la « montagne de Lestonan », près du grand chemin de Quimper à Carhaix. Comme au 18e siècle les de La Marche, père et fils, était encore présents à Lézergué (avant d'émigrer à l'île Grand-Terre en Guadeloupe), on peut supposer que ces fourches patibulaires - on y suspendait les criminels dont on laissait les cadavres pourrir - étaient encore dans les souvenirs des habitants de Lestonan. Dans les documents anciens, Lestonan est aussi mentionné sous l'expression d'une justice à «deux potz» qui appartenait aux seigneurs de Lezergué.

Dans le cahier de doléances d'Ergué-Gabéric du 12 avril 1789, on notera l'article 7 : "Que la justice ne se rende plus qu’au nom du roi ; que l’exercice de justice au nom des seigneurs soit supprimé ;".

Baptêmes, Mariages, Sépultures

Avant la Révolution Français les actes qu'on qualifie aujourd'hui d'état civil, étaient tenus par le curé de la paroisse. Les premiers habitants connus du quartier de Lestonan sont Guillaume Le Quéré (marié en 1644 à Marquise Le Mévellec) et son fils Ambroise qui habitaient la ferme de Kerhuel. Par la suite plusieurs générations de Huitric se sont établis à Kerhuel.

En ce qui concerne Lestonan, sa première mention connue date de 1679 et l'acte de baptême du quatrième enfant de René Jac (marié en 1675 avec Catherine Lozeach) mentionne le lieu de Lestonan Huella. Ceci confirme la préexistence de deux villages Lestonan dont l'un, Lestonan Vras, situé plus haute. Les Jac originaire d'Ergué-Gabéric se sont établis à Lestonan avec sans doute l'aide de la belle famille Lozeach établie au manoir de Parc-al-Lan, et également d'un cousin Lozeach prêtre de la paroisse.

L'inventaire de 1790

Dans le recensement de la population d'Ergué-Gabéric en août 1790, sont mentionnés , sur les terres qui sont celles du Lestonan d'aujourd'hui, le Grand et le Petit Lestonan, et le lieu-dit Kerhuel. A noter que Menez-Groas n'est pas mentionné comme un lieu habité à l'époque. Les autres villages aux alentours sont Kermorvan et Kerousoul.

Tous ces lieux-dits sont mentionnés en 1790 comme faisant partie de la parcelle de Quilly-Huec, une des 10 anciennes trêves de la commune. A comparer avec la situation actuelle de Lestonan qui représente un des trois quartiers majeurs de la commune.

Le Petit et Grand Lestonan

1790GrandLestonan.jpg
1790PetitLestonan.jpg

Les habitants recensés étaient répartis sur deux hameaux dont les noms sont indiqués en français dans le document de recensement : Grand Lestonan ("Leston' vraz") et Petit Lestonan ("Leston' vihan"). Le nombre d'habitants à Lestonan est caractéristique des petits villages composés à l'époque de plusieurs penntys : au total 24 habitants (16 adultes et 8 enfants) regroupés en 7 foyers ("feux"). Par rapport à Leston' vian, le Grand Lestonan comptant le plus grand nombre de feux (4), mais moins d'habitants (11), du fait d'un déficit d'enfants.

1790TailleurLestonan.jpg

Les sept feux - regroupement des personnes habitant le même toit et en principe assujetti au l'impôt dit "fouage" en vigueur dans l'Ancien Régime - ont essentiellement une activité rurale. A priori aucun chef de famille n'était propriétaire de sa ferme, car tous sont déclarés "journaliers" (commis agricoles se louant à la journée). Seul Louis Crédou de Leston' Vraz, journalier également et veuf lors du recensement, est crédité du titre d'actif, c'est-à-dire d'un niveau social suffisant pour être électeur ; une domestique est déclarée dans son "feu".

Au-delà de ces professions agricoles, aucun commerçant n'est déclaré à Lestonan. Par contre seuls deux artisans ont une activité relativement voisine : un tailleur, Jacques Deloria âgé de 43 ans et marié à Anne Barré, au Grand Lestonan, et au Petit Lestonan un tisserand, Alain Daouedal marié à Marguerite Le Tricher, qui fait travailler une domestique de 17 ans.

La ferme de Kerhuel

En 1790, la ferme de Kerhuel semble plus importante que les exploitations du Petit et Grand Lestonan. Certes il n'y a que 10 habitants, mais ils forment un seul feu autour de Guillaume Quenec'h-Deniel. La profession de ce dernier n'est pas indiquée, si ce n'est son statut d'actif, mais il est vraisemblablement agriculteur, propriétaire de sa ferme et il emploie trois domestiques de 16 à 25 ans.

Kerhuel1790.jpg

Le XIXe siècle

Le cadastre de 1834

A. Les routes sur le cadastre

Les routes traversant le quartier de Lestonan étaient très différentes au 19e. La carte ci-contre montre les routes et les ruisseaux et l'on voit bien que :

  • les routes ne se croisent pas sur la place actuelle de Lestonan, mais plus haut en haut de la côte de Ménez-Groas.
  • depuis Menez-Groas, pour se rendre au moulin à Papier, la route directe n'existe pas, deux petites routes sont possibles, soit celle de Stang-Venn, soit celle de Kerho-Keranguéau.
  • la route qui mène du hameau de Lestonan (concentré au sud) à la route de Coray correspond à la rue de Pen-Carn et non à la route actuelle principale légèrement à l'ouest qui a été construite dans les années 1990.
  • le croisement de Menez-Groas est marqué par le symbole d'une croix ou d'un calvaire et l'impasse de Menez-Groas est déjà là.
Menez-Groas

A. Les fermes sur le cadastre

Fermes de Lestonan

Ce qui n'est pas explicite sur le recensement de 1790, par contre sur le cadastre on voit bien précisément la localisation géographique de Lestonan et ses lieux habités :

  • le hameau est situé bien au sud de Kerhuel, sur le versant de la côte mène à la route de Coray.
  • toutes les maisons sont bâties sur le côté est de la route principale (actuelle Avenue de Lestonan).
  • le village désigné en 1790 comme Grand Lestonan ou Leston' Vras est formé par les bâtiments situées au nord sur l'amorce du plateau et dont les terres sont adjacentes à Kerhuel.
  • le village désigné en 1790 comme Petit Lestonan ou Leston' Vihan est constitué par les bâtiments (plus nombreux) situées au sud, sur le pan de la côte.
PancarteLestonanVras.jpg
PancarteLestonanVihan.jpg

Les habitants de Lestonan en 1834 sont xxxx (à complèter par les informations de la matrice cadastrale pour les parcelles 1110 à 1120).

Leston' Nevez

A noter qu'au tout début du 20e siècle, la ferme de Leston' Vras est connue par son propriétaire qu'on appelait Lann Leston', son nom réel était Alain Cloarec et il venant de la ferme de Beg-Menez. Cette dernière étant en bordure des bois de la papeterie, René Bolloré l'avait acheté pour pouvoir chasser plus tranquillement. Dans ce contexte Lann Leston' vint s'établir au Grand Lestonan. La cour de sa ferme venait jusque la rue principale (c'est-à-dire l'actuelle avenue), juste un peu plus haut que Leston' Vihan.

Par ailleurs, à la fin du 19e ou plus vraisemblablement on a construit sur le côte ouest de la route principale, en face de Leston'Vihan une ferme qu'on a dénommée Leston'Nevez. Cette ferme doit aussi son existence aux activités de chasse de René Bolloré qui fit l'acquisition de la ferme du Vruguic, et qui en contrepartie fit construire Leston' Nevez pour son ancien propriétaire.

Ferme de Kerhuel La ferme de Kerhuel apparaît comme formé de 9 bâtiments principaux ou dépendances.

Les habitants de Kerhuel en 1834 sont xxxx (à compléter par les informations de la matrice cadastrale pour les parcelles 578 à 585).

KerhuelBatiments.jpg


Ferme de Menez-Groas

Alors qu'elle n'apparaît pas en 1790, la ferme de Menez-Groas apparaît sous la forme d'un seul bâtiment dans le cadastre de 1834. Par contre par rapport à la situation actuelle, le bâtiment n'est pas placé du même côté du chemin (aujourd'hui l'impasse qui a subi peut-être une légère modification de tracé).

Suivant la matrice cadastrale, le propriétaire de Menez-Groas en 1834 est un dénommé François Thépaut. Au début du 20e, la ferme était détenu par René Quéré.

A noter que les trois parcelles entre la ferme et le croisement de Menez-Groas sont dénommées Parc-ar-Groas, Parc-ar-Groas Tosta et Parc-ar-Groas Pella, ce qui atteste l'existence de la croix à cet endroit précis.

MenezGroasPancarte.jpg
MenezGroasBatiments.jpg
Le projet de Bourg en 1840
OppositionBourg.jpg
Le projet de déplacement du Bourg de la commune, décidé et validé par le conseil municipal d'août 1840, apporte des renseignements précieux sur la description du quartier de Lestonan. Les conseillers avaient proposé "le point de jonction des routes de Briec et de Carhaix, près du village de Lestonan", la route de Briec passant par le site d'Odet, et celle de Carhaix étant également celle qui rejoint

Quimper à Coray.

Une opposition farouche au projet se manifesta, fit capoter le projet, et leurs documents sont un descriptif, certes exagéré, de l'état rural de Lestonan. On dispose essentiellement de lettres à l'évêque et au préfet accompagnée d'une pétition contre la "translation" (datée du 12 mars 1842), d'un document imprimé intitulé "Opposition au projet de déplacement du bourg chef-lieu de la commune d'Ergué-Gabéric", d'un compte-rendu du conseil municipal du 10 mai 1840 (3 pages), d'une confirmation du conseil municipal du 9 août 1840 (6 pages), et enfin des observations de l'opposition annexées aux registre des délibérations (1 page).

Le lieu "Garront Leston" prévu pour le nouveau cimetière, le presbytère, la place publique et les édifices publics, dont une maison d'école, se situait au sud de Lestonan Vihan, à savoir les champs bordant la rue de PenCarn et appartenant à l'époque à un dénommé Le Pape. Voici comment les opposants décrivaient cette "garenne de Lestonan" qu'ils qualifient d'argileuse et ventée :

PencarnPancarte.jpg
Le terrain sur lequel il est question de transporter le bourg est en entier composé d'une épaisse couche d'argile si compact qu'il sert à la fabrication de la poterie [...]

A-t-on songé aux suites de la construction d'une église et autres édifices publics sur un plateau aussi élevé, sans le moindre abri, exposé à tous les coups de vent et aux ouragans si répétés et si violents sur notre littoral ?

[...] que le terrain étant assie sur argile à potrie et n'absorbant pas les eaux de pluie, est inondés tous les hyvers et présente pendant plusieurs mois de l'année l'aspect d'un véritable marais.

Et pour l'approvisionnement en eau, la situation n'est pas simple non plus :

FontaineOdet.jpg
Qu'à la fin de chaque été pour peu qu'il n'ait pas été pluvieux, les fontaines existantes sur ce terrain ne coulent plus, ou sont à sec. [...] la fontaine de Lestonan, celle située sur le terrain même du nouveau bourg est improductive l'été ; on y dit par un toutefois dubitatif que deux autres fontaines qui ne dépendent pas du dit terrain, l'une à 100 mètres, et l'autre à 240 mètres, ne tarissent pas, ce qui ne veut pas dire qu'elles donnent une eau potable?

Nous affirmons qu'au mois de septembre 1840, aucune de ces trois fontaines ne coulaient.

Reste donc la fontaine de Munudic qui est à 700 mètres (près d'un quart de lieue) et qu'il faudrait acheter avec l'emplacement d'un lavoir.

Témoignages de J-M. Déguignet (1834-1905)

Jean-Marie Déguignet qui a écrit ses cahiers de "Paysan bas-breton" et qui a vécu de 1844 à 1851 non loin de Lestonan apporte un témoignage très intéressant sur la réputation des habitants de Lestonan dont les activités changent avec le développement de la papeterie d'Odet.

Les six fermes maudites Page 90 de l'Intégrale de ses Mémoires, Jean-Marie décrit le métier de mendiant qu'il faisait à l'époque depuis son village de Quélennec, et mentionne les fermes du quartier de Lestonan comme plutôt hostiles et peu accueillantes :

Mendiants01.jpg

Les fripons (**) de ma commune, dont j'ai déjà parlé, en faisait autant (**) lorsqu'on leur refusait quelque chose. Il y a encore six fermes dans cette commune, sur lesquelles la malédiction de ces bandits est restée. On entend toujours dire quand on parle de ces fermes :


"Leston vian, Leston vras,
Guili vian, Guilli vras,
Keruel et Penec'h
Mar ve ann tan en bo c'huec'h" (***)



C'est-à dire qu'ils avaient aussi appelé le feu du ciel sur ces six fermes, parce qu'on ne leur y donnait pas toujours ce qu'ils demandaient.

Notes:

  • (*) les mendiants
  • (**) maudire quelqu'un par une incantation.
  • (***) "Petit et grand Lestonan / Petit et grand Guilly / Kerhuel et Pennec'h / Que soit le feu dans vous six"

Les papetiers-agriculteurs Page 35 de l'Intégrale de ses Mémoires, il est question des fermiers qui occupaient un emploi d'ouvrier à la Papeterie. Dans la plupart des cas, les ouvriers n'abandonnaient pas leur ferme qu'ils exploitaient en plus et en louant des journaliers comme le père de Jean-Marie.

Meules.jpg
Mon père était toujours occupé à faire les travaux des employés de la papeterie, puis ensuite il alla chez les fermiers quand la moisson fut arrivée. [...] Et quand on rentrait ces céréales, mon père avait là un emploi spécial pour lequel il était très recherché. C'est pour mettre les gerbes en meules rondes qu'on appelle en breton groac'hel, au pluriel groac'hili. Mon père était passé maître dans l'art de confectionner ces meules.

En ce temps il fallait que ces meules fussent bien confectionnés ; le battage se faisant tout au fléau durait fort longtemps, et si pendant ce temps il survenait de grandes pluies et que ces meules fussent mal arrangées, l'eau y pénétrait et tout était perdu grain et paille. Aussi la plupart des fermiers voisins tenaient à avoir mon père pour confectionner ces meules.

La révolution industrielle Pages 514 et suivante de l'Intégrale de ses Mémoires, Jean-Marie Déguignet donne son sentiment sur les méfaits de l'ère industrielle en accusant les nouvelles machines de la papeterie Bolloré de tuer le marché du travail.

Machines.jpg
J'ai déjà parlé de la fabrique de papier d'Ergué-Gabéric, perdie là-bas au fond du Stang-Odet et que j'ai vu fonder. Cette fabrique occupait autrefois tous les ouvriers des environs, mâles et femelles, jeunes et vieux. En bien, aujourd'hui il n'y a presque plus personne, quoiqu'elle fabrique dix fois plus de papier. Il y a deux ou trois ans un individu ayant travaillé dans cette fabrique se trouvait chez le perruquier mon voisin et disait que la veille on avait encore coupé les bras à dix ouvriers d'un coup !

"Comment, disait un client qui ne saisissait pas bien l'ironie, dix bras ? d'un seul coup ? par la même machine ?

- Oui juste, comme vous dites, par la même machine. Une nouvelle machine arrivée l'autre jour du Creusot et qui fait à elle seule l'ouvrage de dix ouvrier et par conséquent le patron a mis douze [sic] ouvrier dehors. Et ce n'est pas fini, il en viendra d'autres jusqu'à ce que tous les ouvriers soient remplacés par des machines.

Annotations

  1. Fourches patibulaires, s.f.pl : colonnes de pierre dotées d'une traverse de bois où les condamnés à la mort sont pendus et exposés à la vue des passants. Elles ne servent donc qu'aux supplices capitaux, dont les exécutions ne se faisaient autrefois que hors les villes. Seul le seigneur Haut Justicier a le droit d'avoir des fourches patibulaires (ou gibets), puisqu'il a le droit de condamner un criminel à mort. À l'égard du nombre des piliers des fourches patibulaires, il y en a à 2, à 3, à 4 ou à 6, selon le titre et la qualité des fiefs qui ont droit d'en avoir. Les simples seigneurs Hauts Justiciers n'ont ordinairement le droit d'avoir que des fourches patibulaires à 2 piliers, s'ils ne sont fondés en titre ou possession immémoriale. Les fourches à 3 piliers n'appartiennent de droit qu'aux seigneurs châtelains; celles à 4 piliers n'appartiennent qu'aux barons ou vicomtes ; celles à 6 piliers n'appartiennent qu'aux Comtes. Source : "La justice seigneuriale et les droits seigneuriaux" de Claude-Joseph de Ferrière. [Terme] [Lexique]
  2. Patrimoine vernaculaire, g.n.m., ou petit patrimoine : l'ensemble des constructions ayant eu, dans le passé, un usage dans la vie de tous les jours (Wikipedia). [Terme] [Lexique]